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Europe/USA : les banques européennes de nouveau dans la course ?

Banques européennes vs. américaines en 2025 : l’Europe rattrape-t-elle son retard malgré fragmentation et protectionnisme ?

À quoi reconnait-on la bonne santé d’un secteur économique ? Les points de vue peuvent varier mais la performance boursière de long terme permet souvent de dresser un bon diagnostic.

Les banques européennes ont délivré une performance honorable depuis la crise de 2008 avec 5% annualisés mais les banques américaines ont fait bien mieux, à 11% en moyenne.

Un contexte macro-économique plus favorable (pas d’austérité budgétaire, pas de taux négatifs), une réglementation pragmatique (la compétitivité n’a jamais quitté l’esprit du régulateur) ont fait du secteur bancaire US le grand gagnantde ces 15 dernières années : plus concentré, plus performant et dominant de nombreux segments de marchés notamment dans la banque d’investissement.

Mais l’Europe semble aujourd’hui de nouveau dans la course. Les taux sont redevenus positifs, l’excès de capital accumulé ces 10 dernières années est redistribué aux actionnaires ou mis en réserve pour les opérations de consolidations à venir, les ROE sont depuis quelques trimestres en moyenne supérieurs à ceux des banques américaines et nos politiques ont replacé la compétitivité au cœur des réformes législatives et réglementaires. Mais attention, nos vieux démons ne sont jamais bien loin.

Contextes Macro-Économiques : Résilience des Banques US vs. Stagnation des Banques Européenne

En 2025, l’écart macro se creuse toujours, mais l’Europe montre des signes de rebond. 

Aux États-Unis, le PIB croît de 1,8%, porté par une consommation robuste et des investissements en IA, malgré un ralentissement (+2,8% en 2024). L’inflation core descend vers 2%, permettant à la Fed d’anticiper des baisses de taux à 3,75% fin d’année, qui reste dans une zone de confort pour les marges nettes d’intérêt (NIM) bancaires.

En zone euro, le tableau reste contrasté : PIB à 1,0-1,2%, impacté par l’austérité résiduelle et les chocs énergétiques, mais dopé par deux relances fiscales prometteuses. 

L’Allemagne, sous l’impulsion du chancelier Merz, a approuvé un budget 2025 ambitieux (dépenses à 2,4% du PIB pour la défense et les infrastructures), marquant un virage vers plus d’audace budgétaire.

Parallèlement, les programmes de la Commission européenne pour la transition verte – via le Green Deal et des appels à projets LIFE (plus de 80 Md€ alloués en 2025 pour énergie, circularité et adaptation climatique)– injectent un dynamisme industriel, visant 15% du marché mondial des clean techs.

L’inflation core à 2,1% justifie une pause des taux ECB à 2% (jusqu’en 2027 au moins) sans le punch américain, mais avec un filet de sécurité croissant. 

Résultat : les banques US surfent sur un cycle de crédit expansif, tandis que les européennes, profitent d’un cycle de taux positifs depuis quelques trimestres et espèrent que ces vents favorables ne faibliront pas face aux craintes de fragmentation de la dette souveraine européenne.

L’Europe paie encore son excès de vertu fiscale passé et reste handicapée par la fragmentation budgétaire de l’Union Européenne ; l’Amérique récolte les fruits de son audace chronique. Leçon : la croissance naît du pragmatisme budgétaire – et l’Europe semble enfin l’avoir compris.

Profitabilité : Les Banque Européennes Rattrapent les Banques US, Mais pour Combien de Temps ?

Les ROE des banques européennes s’envolent à 12,3% au Q2 2025 (EBA), grâce à des NIM gonflés par un bon contrôle du coût des dépôts et une pentification de la courbe des taux dans la zone Euro et des fees en forte en hausse (+9%).

Les rachats d’actions (15 Md€ Q3) boostent les rendements. 

Aux US, les 13 banques de l’indice BANKX maintiennent 11% ROE moyen, mais les banques régionales peinent sous les provisions CRE (+20% YoY).

Côté valorisations, les banques européennes ont connu un parcours boursier spectaculaire depuis quelques trimestres mais restent sous-cotées à 9,2 x les résultats 2026 contre 12,2x pour les banques américaines.

L’Europe redistribue enfin son coussin de capital (CET1 15% vs. 13% US), libérant 50 Md€ pour M&A.

Mais attention : cette surperformance est conjoncturelle. Sans réformes, un retour aux taux bas éroderait ces gains, comme en 2010-2020 où l’EU stagnait à 5% ROE.

Réformes et Enjeux Réglementaires : Pragmatisme Américain vs. Rigidité Européenne

C’est ici que l’Amérique excelle. Le "Basel Endgame" US, censé durcir les exigences en risques moyens pondérés, est en pleine simplification. Michelle Bowman, Vice-Présidente de la Fed en charge de la supervision, a repoussé le phase-in de Bâle IV. Elle propose également des allègements pour les petites banques (<250 Md$ assets).

Post-Dodd-Frank, les US ont allégé les règles pour les <100 Md$, favorisant la consolidation. Selon les estimations, le "Basel Endgame" pourrait libérer entre 100 et 150 milliards de dollars de capital. En Europe, le pragmatisme émerge enfin, mais tardivement.

La suspension du FRTB (Fundamental Review of the Trading Book) jusqu’en 2027 annoncée par la Commission en juin 2025, évite un choc concurrentiel supplémentaire face aux US. La réforme de la titrisation donnerait aux banques européenne un outil de gestion bilantielle plus efficace qu’il ne l’est actuellement.

D’autres réformes ont été récemment proposées.

La France mène la charge sur les banques systémiques globales avec une proposition de fusion MREL/TLAC pour les G-SIBs, créant une seule exigence basée sur les risques moyens pondérés, supprimant les doublons en matière de besoins en fonds propres.

L’Allemagne s’attaque aux plus petites banques avec un régime simplifié pour les banques <10 Md€ assets (Bundesbank, septembre 2025), limitant le reporting afin d’alléger les coûts pour 1 500 petites entités.

Ces initiatives, inspirées du modèle US, visent à contrer la "sur-réglementation" qui a dégradé la compétitivité du secteur depuis 2010. Mais ces chantiers avancent lentement et l’Europe risque de perdre son avance récente en matière de profitabilité.

Risques : Banques Européennes et US Font Face à des Menaces Partagées, Mais Plus Aiguës Outre-Atlantique

Les banques européennes sont moins risquées. C’est la contrepartie de la dureté de la réglementation en Europe et de la prudence du régulateur.

Aux US, les expositions au CRE (Commercial Real Estate) sont élevées et peu performantes. Les rares banques Européennes qui y sont exposées ont d’ailleurs enregistré des défauts aux cours des derniers trimestres (Deutsche Bank Notamment).

Toujours aux US, les expositions des banques américaines aux NDFI (non-depository financial institutions) qui représenteraient environ 300 Md$ (Moody’s) inquiètent depuis quelques trimestres du fait de certaines faillites et fraudes (Zions 60 M$ pertes, Q3).

En Europe, l’ESRB a alerté les banques sur l’exposition aux NDFI, mais celle-ci sont plus limitées, comme les expositions CRE qui représentent environ 10% des prêts (vs. 30% US).

Enfin les banques européennes disposent encore de provisions de précautions constituées pendant le COVID alors que les banques américaines les ont reprises. L’Europe, plus prudente résistera mieux en cas de choc de crédit.

En somme, le secteur bancaire européen flirte avec l’excellence : ROE supérieurs, capital excédentaire, profils moins risqués. Les projets de réformes récentes sont très encourageants pour l’avenir. Mais malgré ces aspects positifs, l’Europe reste fragmentée et donc peu compétitive par rapport aux banques américaines où la consolidation est largement achevée depuis une décennie.

L’Europe doit accélérer sa propre unification bancaire afin d’améliorer sa compétitivité face aux géants US et asiatiques. Mais si nous voulons réduire l’écart, il faut tuer nos vieux démons protectionnistes. Considérons un frein subtil mais récurrent à cette consolidation européenne : les contraintes sur le ratio prêts/dépôts, souvent imposées par les États pour forcer un financement domestique de l'économie réelle.

L'exemple récent de l'OPA avortée d'UniCredit sur Banco BPM, torpillée en 2025 par Rome via son "golden power" (exigeant un ratio prêts/dépôts élevé au prétexte de préserver le financement local), illustre parfaitement ce piège.

Plutôt que ces entraves protectionnistes, qui freinent les synergies transfrontalières et perpétuent la fragmentation, l'Europe gagnerait à accélérer les réformes qui permettent aux banques de mieux gérer leurs risques tout en continuant à financer l’économie. La réforme de la titrisation, un outil largement utilisé aux USA depuis longtemps, est de ce point de vue cruciale.