Sur les fondamentaux :
Depuis le début de l'année, les analystes ont revu leurs attentes de résultats à la hausse de plus de 10% pour 2022 et 2023, et de plus de 15% pour 2024. D'après le consensus, les résultats des banques en 2024 devraient être 35% à 40% plus élevés qu'en 2021, ce qui amènerait leur ROE confortablement au-dessus de 10%.
Les tendances observées au deuxième trimestre se poursuivent et devraient se refléter favorablement dans les résultats du T3 :
- Le secteur bénéficie d'une forte demande de crédit de la part des entreprises, avec un stock en croissance de 8% sur 1 an glissant.
- Les bénéfices des hausses de taux commencent à se percevoir à l'actif, en particulier pour les banques anglaises, allemandes et périphériques. Les marges sur les nouveaux prêts ont considérablement augmenté sur l'ensemble du spectre.
- Les défauts restent faibles dans un contexte de forte croissance nominale. Les banques pourraient augmenter légèrement les provisions de prudence.
- La banque d'investissement classique pâtit de la baisse d'activité dans les fusions acquisitions et les marchés primaires, mais c'est essentiellement un problème pour les banques américaines et suisses. Le dynamisme des salles de marché porte l'activité des européennes.
- Si les premières pressions sur les coûts se font sentir, les volumes d'activité ont jusqu'à présent crû plus vite que les salaires.
Pour la suite, le débat porte sur l'effet net des hausses de taux d'une part, et de l'impact d'une récession et des pressions politiques d'autre part :
- Une hausse de taux de 100bps amène une hausse du ROE de 1,5 voire 2 points (cet effet s'estompe quand les taux passent au-dessus de 2%).
- Un doublement de défauts par rapport à la moyenne historique amène une baisse du ROE de 3 points. Usuellement on constate dans les récessions un facteur multiplicatif entre 1,5x et 3x.
- Les pressions politiques resteront importantes mais sont impossibles à quantifier. Dans la zone Euro, l'Espagne a pris jusqu'à présent la position la plus dure, ce qui n'a pas empêché les banques espagnoles de surperformer largement le marché.
Sur les valorisations :
Les ratios cours / bénéfices sont aux plus bas de leur histoire. Pour certaines banques, ils atteignent des niveaux très faibles (4x pour Société Générale, Deutsche Bank ou Unicredit par exemple). Cela traduit une inquiétude du marché sur plusieurs fronts :
- La perspective d'une récession sévère liée à la vie chère et au resserrement monétaire
- Les risques d'une augmentation brutale et désordonnée des taux qui ne laisserait pas aux banques le temps de recycler leurs actifs sur des rendements plus élevés
- Les risques de mesures politiques adverses (taxes spéciales, moratoire, augmentation forcée des dépôts bancaires, etc.)
Les ratios cours / valeur comptable oscillent entre 0,5x et 0,6x, ce qui implique une rentabilité estimée par le marché à 5%-6% pour le secteur. Ce chiffre laisse penser que le scénario central du marché est une combinaison de hausse de taux et de récession sévère.
Sur les catalyseurs :
La saison des résultats pourrait donner un peu de souffle au secteur. Les analystes ayant été prudents dans leurs anticipations de revenus d'intérêt, les banques viendront en majorité au-dessus du consensus avec une marge importante. La plupart communiqueront des objectifs à la hausse pour les années à venir, tout en soulignant l'incertitude macroéconomique.
Une poursuite de la stabilisation des cours de l'énergie devrait faire revenir certains gérants sur les cycliques européennes, en particulier outre-Atlantique. Toute donnée pointant à une résistance de l'activité économique ou à une modération progressive de l'inflation sera interprétée très favorablement.